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"On est en train de planifier le massacre des étudiants en médecine wallons" (CIUM)
12/08/2016 - 06:05
Photo: Shutterstock

La décision du Conseil d'État de suspendre le classement du concours de médecine organisé par l'université de Liège en fin de 1ère médecine a pour effet d'autoriser tout étudiant ayant réussi les 45 crédits nécessaires à passer en 2e année de bachelier, estime l'Unécof, l'Union des étudiants de la communauté française. La haute juridiction "a invalidé le concours", ce qui a pour conséquence d'annuler l'accord politique conclu entre Maggie De Block, ministre de la Santé et Jean-Claude Marcourt, ministre de la Fédération Wallonie-Bruxelles de l'Enseignement supérieur sur les numéros Inami. Les étudiants retombent ainsi dans le doute, déplore l'Union.

"On est en train de planifier le massacre des étudiants en médecine wallons", dénonce le CIUM, Comité interuniversitaire des étudiants en médecine. Pour la Fédé (conseil étudiant de l'ULg), "nous sommes passés d'une situation déplorable avec 29 reçus-collés (étudiants ayant réussi leurs examens mais pas le concours, ndlr) à une situation catastrophique avec l'incertitude quant aux numéros Inami".

Les étudiants le disent haut et fort: ils en ont marre. Marre de "cette petite guéguerre politique, du match de ping-pong pathétique entre une Wallonie de gauche et un gouvernement de droite, qui n'est pas digne des soins de santé en Belgique", dénonce Opaline Meunier, présidente de l'Unécof. Pour elle, il est temps que cela cesse. "Le Conseil d'Etat est hors de cette guéguerre et a jugé objectivement qu'il existait un problème de motivation du concours".

La haute juridiction a en effet jugé illégal l'arrêté qui instaurait un quota de 1.230 nouveaux praticiens autorisés à exercer en 2021. Il avait été décidé en l'absence d'évaluation précise de la commission de planification de l'offre médicale, le Conseil d'État l'a donc jugé arbitraire. "C'est le noyau du problème, le manque d'un cadastre. Actuellement, rien ne justifie les quotas, la limitation à l'accès de la profession de médecin".

La ministre fédérale s'est toutefois défendue, estimant que le quota était "solidement fondé. (...) La Commission de planification a proposé de prendre le quota de 2020 comme la meilleure approche possible, une opinion que le niveau fédéral a suivie".

"Nous n'avons pas dû lire le même arrêt", réagit Opaline Meunier. "L'argument avancé par la ministre était déjà celui avancé au Conseil d'Etat, qui l'a rejeté".

Ce qui inquiète les étudiants est que la décision judiciaire rendue vendredi a un impact sur l'accord politique conclu entre Maggie De Block et Jean-Claude Marcourt. La première acceptait en effet de libérer des numéros Inami à condition qu'un filtre soit instauré. Comme ce dernier a été invalidé, la ministre a indiqué que "le niveau fédéral ne peut pas étendre le système de lissage et donc élaborer une solution pour tous les étudiants en formation". En d'autres mots, l'accord politique ne tient plus et les étudiants en cours de cursus n'ont aucune certitude d'obtenir un numéro Inami, indispensable pour exercer, à la fin de l eurs études.

Seul un nombre limité de numéros Inami est délivré, d'où l'instauration de quotas, dénoncée non seulement par les étudiants mais également par les médecins. Marie Hechtermans, médecin et membre du GBO (Groupement belge des omnipraticiens, syndicat le plus important des médecins généralistes) déplore que les spécialités ne reçoivent pas toujours le nombre d'étudiants nécessaires. "Les pénuries diffèrent selon les spécialités et les territoires". Elle appelle donc à conformer les quotas établis aux réels besoins de la profession.

Quentin Lamelyn, étudiant en 6e année de médecine et président du CIUM, est, lui, scandalisé. "On va priver des étudiants qui ont réussi leurs années d'étude, qui se sont battus parce qu'il n'y a pas assez de numéros Inami à disposition alors qu'à côté de cela, on importe de plus en plus de médecins étrangers".

L'Unécof, le CIUM, la Fédé et le GBO en appellent désormais à la responsabilité de Maggie De Block pour qu'elle "agisse enfin et adapte les quotas de numéros Inami disponibles et ce, avant le début de la prochaine année académique". Ils réclament également que Jean-Claude Marcourt "permette que cet arrêt (du Conseil d'État) soit applicable à tous les étudiants dès la rentrée". "Tant qu'un cadastre n'aura pas été réalisé, nous ne lâcherons pas", conclut Opaline Meunier.